Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Candidater à un LLM pour les nuls

Publié le par Carole Desgoutes Wojtkowiak

La procédure de candidature LLM pour les nuls !

L’idée originale de cet article m’est venue alors que je débutais mes propres démarches en vue d’un LLM, ce sésame international des études de droit. Au début, il est fort possible que vous vous sentiez dépassés, voire même, que vous vous disiez « mais c’est impossible, ce projet n’est qu’un mythe ». Oui, cela pourrait se comprendre. En effet, le système américain étant tellement différent, et ces derniers réputés pour être formidablement procéduriers, vous vous heurtez à une triste réalité : Le projet de LLM vous entraîne dans une véritable bureaucratie. Alors que je suis en train d’arriver à bout de toutes mes démarches, je peux à présent résumer les différentes étapes avec humour et décontraction. Et croyez-moi : j’aurais voulu trouver un article tel que celui-ci !

1ère étape : comprendre le fonctionnement

C’est comme lorsqu’un de vos chargés de travaux dirigés vous rappelle que vous devez lire l’énoncé de votre cas pratique avant d’entreprendre toute autre étape. Sauf si vous avez la chance d’avoir un enseignant, un pôle d’orientation très à la page ou encore un ami calé sur cette question, le projet LLM va vous demander de longues heures de recherches sur internet. Il faut bien entendu être opérationnel en anglais. Si ce n’est pas le cas, travaillez d’avantage et améliorez votre niveau, car celui qui vous sera demandé est très avancé.

Vous vous surprendrez à rêvasser sur les sites internet des plus prestigieuses universités du monde avant de tomber sur la section « admissions ». Et là, le verdict tombe généralement : on vous parle de Credential Assembly Service, on vous parle de GDP, de LSATs, de TOEFL iBT à 100/120… vous saurez à ce moment-là que vous n’êtes pas au bout de vos peines, et que votre admission dans l’une d’entre elles se méritera.

La bonne nouvelle : en tant qu’étudiant français/étranger, vous n’avez pas à passer les LSATs (sauf si vous ambitionnez de faire un J.D), ni à connaître votre GDP (qui correspond intrinsèquement à la moyenne générale de toutes vos études post baccalauréat – ou encore l’ensemble des A, B, C… collectés durant le Bachelor’s pour les américains). Il vous faudra par contre passer le TOEFL, et vous créer un compte sur le Law School Admission Council.

Il faut également savoir qu’il existe deux sessions annuelles : le programme de printemps et le programme d’automne. A l’image de notre système, le démarrage des cours est privilégié pour la fin de la période estivale (généralement en août).

2ème étape : commencer à évoquer le projet avec le banquier et identifier des organismes susceptibles d’attribuer une bourse – comme Fulbright

Comme toutes les institutions concernées ou autres parties prenantes le clament, les démarches pour un LLM doivent être entreprises au moins un an avant la date désirée de départ. Vous savez d’ores et déjà qu’une année d’études dans une Université aux Etats Unis va vous coûter la modique somme de environ 70 000 US$. En effet, les frais de scolarité – « tuition » - sont de l’ordre de 30 000 à +50 000 US$ et il faudra également compter les dépenses et frais de logement + transports + alimentaires + livres (oui, le budget livres est de l’ordre de 1000$ !) donc autant commercer à parler finances avec les personnes concernées.

En parallèle, un certain nombre d’organismes privés et publics peut vous aider à concrétiser ce projet. La Commission Franco-américaine Fulbright est celui à privilégier car elle alloue chaque année des bourses à une vingtaine d’étudiants dont le montant peut s’élever jusqu’à 40 000$. Je dois tout de même prévenir qu’il n’a pas que les étudiants en droit qui soumettent leur candidature, et que les critères de sélection se fondent sur le mérite et l’excellence. Il faut donc candidater, élaborer un dossier convainquant, mais ne pas compter dessus. Une seule session d’accueil et d’étude des candidatures est prévue chaque année : vous devez pour cela déposer votre dossier avant le 1er Décembre de l’année précédant votre départ envisagé.

Ensuite, en fonction de vos spécialités, des cabinets d’avocats de taille importante (White and Case, Herbert Smith…) ainsi que des partenaires des Universités offrent également des bourses d’études aux étudiants brillants désireux de tenter l’aventure. Faites donc vos dossiers !

Les Universités et leurs fondations privées offrent bien souvent également des solutions. Bien entendu, plus l’Université est réputée, (plus il est difficile d’y rentrer !! Non c’est vrai ?? Oui, oui !!!) plus elle souhaite aider financièrement ses admis. Cela peut paraître étrange, mais les « Ivy Leaguers » ont une logique bien à elles : leur vision se porte à long terme. En aidant les meilleurs étudiants financièrement, elles comptent sur leur réussite professionnelle future, et donc, récolter les fruits du succès sous forme de dons. Les Ivy Leaguers vivent de manière significative grâce aux dons octroyés par les « alumnis ».

Et pour finir, il vous reste les prêts à taux zéro que réservent certaines banques américaines aux étudiants (à venir), ou encore les services de nos chères banques françaises. Pour se prémunir de l’éventuelle frustration d’être pris quelque part, sans avoir pu obtenir une bourse, et de ne pouvoir honorer son admission, il conviendra donc d’en parler le plus vite possible à son conseiller habituel afin qu’il évalue vos potentielles autorisations de crédit.

3ème étape : Créer un compte sur le Law School Admission Council (LSAC)

Il ne s’agit pas de l’étape la plus difficile. LSAC est en fait une plateforme destinée à rassembler toutes les pièces demandées en vue de l’inscription. Si vous désirez postuler à plusieurs programmes, ou dans des universités de la East Coast ET de la West Coast, LSAC vous fera gagner un temps considérable. Il se charge de (presque) tout. Vous pourrez d’ailleurs sélectionner vos programmes et écoles directement en ligne.

S’inscrire au Credential Assembly Service est gratuit. Au tout début. Mais si vous envisagez sérieusement d’aller au bout des démarches, il faudra souscrire au Document Assembly Service (DAS), et cela vous coûtera 85$. Parfois, l’option International Transcript Authentication and Evaluation Service (TAES) sera requise. Elle coûte 135$ en plus de DAS. La plupart des bonnes Universités ont recours aux services de LSAC/DAS, c’est donc une étape qu’il ne faut pas snober. Il faut bien s’assurer de ce que chaque School of Law requiert pour les candidatures. Vous trouvez généralement la liste dans leur section « LLM admission ».

LSAC regroupera concrètement : - vos lettres de recommandation (qu’elles s’adressent à une ou plusieurs Law Schools) ; - vos relevés de notes + traductions ; - vos tests du TOEFL… Et la bonne nouvelle, c’est que ce sera fait pour 5 ans. La durée de validité de votre compte est effectivement de 5 ans, donc libre à vous de recandidater et recandidater encore jusqu’à l’admission de vos rêves, à Harvard, Yale, Stanford…

4ème étape : S’inscrire au TOEFL (voire repasser le TOEFL)

La première fois que l’on s’inscrit sur le site de ETS (Educational Testing Systems) afin de réserver une date pour le TOEFL, il est possible de se sentir quelque peu perdu. Je crois qu’il n’existe pas de traduction française pour la plateforme d’inscription, d’où l’intérêt – on le rappellera encore – de bien comprendre l’anglais écrit. En fait, ce n’est pas si compliqué : vous devez trouver un centre d’examen proche de chez vous et ensuite sélectionner une date au-delà de 2 semaines. A Lyon, à titre d’exemple, le centre d’examen se situe sur le site de l’Université Lyon 3.

Il faut pour cela renseigner un certain nombre d’informations vous concernant : adresse permanente, nom – prénom (ne vous faites pas avoir : « First Name » c’est bien votre prénom), numéro de passeport ou de carte d’identité… Le site vous fera des suggestions, des packs d’entrainement… vous êtes libres d’opter ou non pour ces TOEFL blancs. Si vous ne l’avez jamais passé, ou que vous ne disposez pas d’un laboratoire de langues, ce choix peut être judicieux. Mais il n’est pas gratuit : environ 40€ le test blanc à mon souvenir. Quant au test lui-même : il faudra régler environ 250€. Et non, le TOEIC n’est pas accepté ! Je sais c’est moins cher, et c’est fort dommage. Mais bon, il n’y pas le choix. Ou alors, renseignez-vous auprès de votre faculté.

A la suite de cet examen relativement indigeste, -oui, 4 heures à devoir rester concentré, alerte, et surtout n’obtenir qu’une pause de 10 minutes pour manger- vous recevrez vos résultats en ligne et par courrier quelques jours plus tard (environ 10 jours). Vous devez faire envoyer vos résultats directement à LSAC ou aux Universités auxquelles vous postulez. Pour cela, il faut trouver le code de l’institution concernée.

Bon, la plupart des universités demande au moins 90/120 au TOEFL iTB. Mais les meilleures, les Ivy Leaguers, ou autres consorts Berkeley, UCLA… demandent un exigeant 100/120. Et croyez-moi, il ne suffit pas d’être très bon en anglais, il faut être très très bon ou très très entraîné pour avoir un 100/120 du premier coup. Je suggère donc de le préparer plus qu’un minimum si vous ne désirez pas le repasser une deuxième fois.

5ème étape : Demander une traduction des diplômes et relevés de notes

Certaines universités proposent spontanément des traductions des relevés de notes et attestations de réussite. Ce n’est malheureusement pas une généralité. Il convient de se renseigner auprès des services de la scolarité.

Il y a deux possibilités : Soit vous connaissez personnellement un traducteur et vous vous arrangez avec lui ; soit vous devrez passer par des sociétés de traduction. Vouloir traduire soi-même ses diplômes est une solution assez risquée, à bon entendeur. Petite précision agréable: la traduction assermentée n'est pas demandée. 

Pour les sociétés de traduction, vous pouvez obtenir facilement un devis. Généralement, il existe un tarif plafonné au mot, ou à la page. Le prix dépendra donc du nombre de relevé de notes et de diplômes. Mais pour donner un ordre d’idée : pour environ 8 documents (ou pages), le coût global peut avoisiner 250€.

6ème étape : Contacter le service scolarité de son/ses université(s) afin qu’elle(s) envoie(nt) les relevés de notes directement au LSAC

C’est la partie où un grand nombre de difficultés est susceptible d’apparaître. La plupart du temps, les personnels des facultés de droit ont déjà effectué cette démarche. Mais cette étape n’en demeure pas moins hasardeuse.

Si vous passez par LSAC, il faudra enregistrer tous vos diplômes en ligne, et ensuite imprimer/enregistrer un « transcript request » pour chacune de vos formations. Il vous sera demandé quel est votre premier diplôme en droit. Il n’y a ici aucun piège : il s’agit de la licence.

Ensuite, il faut solliciter de chaque établissement dans lequel vous avez obtenu un diplôme (ou une partie du diplôme – je pense notamment à la licence) qu’il imprime un duplicata de vos relevés de notes, qu’il adjoigne la traduction en anglais de ces documents, qu’il remplisse le « transcript request form », qu’il applique sur chacun d’eux le tampon officiel de la Faculté, et que le tout soit envoyé aux services de LSAC en Pennsylvanie dans une enveloppe institutionnelle. Attention, l’information qui va suivre est capitale et doit être écrite en rouge dans les e-mails adressés aux personnels des facultés : il faut également un dernier tampon de l’établissement sur le rabat arrière de l’enveloppe. Si ce tampon/sceau manque : LSAC vous notifiera qu’il ne prendre en compte le relevé en langue originale, ne retiendra que la traduction, et il faudra demander à la faculté de procéder à nouveau à l’envoi.

Sauf que, lorsque vous avez des délais à respecter, vous pouvez être préjudicié. LSAC annonce qu’il faut environ 4 semaines pour traiter vos documents. Si vous avez de la chance, cela peut prendre moins de 2 semaines. Toutefois, il est important de prendre cet élément en considération.

N’hésitez pas non plus à aller directement aider les personnels des facultés à remplir ce dossier, et faire un petit monitoring des tampons (bien que vous ne soyez pas autorisés normalement à prendre connaissance de ces relevés de notes – normalement vous les connaissez déjà, en France, tout est informatisé).

7ème étape : Les lettres de recommandation et le Personal Statement

Les lettres de recommandations : Il faut les solliciter directement des enseignants qui vous connaissent, voire même d’anciens employeurs ou maîtres de stage. Sur le site de LSAC « LORs », vous devrez enregistrer ces derniers, communiquer leur adresse, leur e-mail, leur numéro de téléphone. Vous pouvez leur faire envoyer un mail, cela leur permettra de directement se connecter au site du LSAC sous la rubrique « recommenders ». Ainsi, ils seront en mesure d’enregistrer en personne votre lettre.

Petite spécificité du système américain : vous devez en principe renoncer à votre droit de prendre connaissance du contenu de ces lettres. Au moment où vous enregistrerez vos « recommenders », cochez donc bien sur la case « I waive… » pour vous éviter tout préjudice. Les américains sont convaincus que les lettres de motivations transmises de cette manière sont plus transparentes et sincères. Ils veulent justement éviter toute intervention de l’étudiant dans ce processus.

Personal statement : Vous avez sûrement du entendre parler de ce phénomène ! Mais si, souvenez vous ! Dans les séries américaines adolescentes… avec une musique un peu dramatique et la happy end. Cette déclaration, qui n’est autre qu’une lettre de motivation à l’américaine, présente des caractéristiques pour le moins intéressantes pour qui se serait pas initié. En effet, vous devez raconter qui vous êtes, ce qui vous anime, le fond de votre motivation. J’ai un jour rencontré une responsable du recrutement des LLM programs d’une grosse université californienne, et cette dernière évoquait le « personal statement » dans ces termes : « vous devez nous dire ce que vous avez dans le cœur, qui vous êtes ! » tout en portant son poing à la poitrine.

Le personal statement, c’est tout l’inverse de ce que vous feriez pour rentrer dans un Master 2 en France : vous devez raconter ce qui vous a construit, vos convictions, vos échecs et ce que vous en avez appris, en quoi ça vous a mené ici aujourd’hui. Vous avez fait l’objet de discriminations pendant des années ? Parlez-en ! Vous avez été militant politique ? Vous avez été femme de chambre à subir des humiliations pour vous payer vos études ? Vous avez surmonté de gros ennuis de santé ? Parfait ! C’est l’occasion enfin d’en tirer parti ! Et sur au moins deux pages en plus !

Malgré mon explication quelque peu sarcastique, cet exercice inédit est très intéressant. Cela doit être vu comme un entraînement à la rédaction biographique en anglais. Et puis pour une fois, vous aurez l’occasion de présenter votre parcours sous un nouveau jour.

8ème étape : Les candidatures ACTE FINAL

Vous devez remplir les dossiers de candidature pour chaque programme et chaque école auxquels vous postulez. Via LSAC, vous n’aurez généralement qu’à rajouter votre personal statement ainsi que votre curriculum vitae. En cas de candidature directe (sans l’intervention de LSAC), vous aurez à transmettre vos relevés de notes, traductions de vos diplômes et lettres de recommandation en même temps que vous remplissez l’ensemble du dossier de candidature. Ah oui, et il y a également des frais pour chaque dossier (certaines universités en font grâce – petit geste commercial pour vous attirer dans leurs filets). Cela peut varier entre 80$ et 150$.

Wait and See !

Bonne chance ! 

 

Commenter cet article